La souscription d’un contrat d’assurance-vie peut, de prime abord, sembler anodine.
Toutefois, les circonstances de fait à l’originede cette souscription peuvent parfois amener l’Administration fiscale à s’y intéresser.
Si les services fiscaux considèrent que l’opération n’a eu pour seul objectif que celui d’éluder l’impôt, ils appliqueront la procédure de l’abus de droit (article L 64 du LPF).
Pour rappel, à la suite de la décision Janfin (CE sect. 27 septembre 2006, req. N°260050), la notion d’abus de droit a été revisitée puis élargie.
Dans sa nouvelle rédaction applicable depuis le 1er janvier 2009, l’article L 64 du LPF dispose :
« Afin d’en restituer le véritable caractère, l’administration est en droit d’écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d’un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, si ces actes n’avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.
En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l’avis du comité de l’abus de droit fiscal. L’administration peut également soumettre le litige à l’avis du comité.
Les avis rendus font l’objet d’un rapport annuel qui est rendu public. »
Par ailleurs, l’article L 132-13 du Code des assurances prévoit :
« Le capital ou la rente payables au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant.
Ces règles ne s’appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés. »
Dès lors, la souscription d’un contrat d’assurance-vie est tout à fait légitime à la condition cependant que, compte tenu des circonstances, cette dernière n’ait pour seul objectif que celui d’éviter le paiement des droits de mutation propres aux donations.
Divers avis du Comité consultatif de répression des abus de droit et décisions de jurisprudence ont retenu que l’opération était constitutive d’un abus de droit et masquait une donation déguisée (Avis 97-16 et 99-18 ; TGI Toulouse 28 janvier 1999 et CA Angers 22 juin 2004, Cass. civ. 21 décembre 2007 n°06-12769).
Il convient donc d’être très vigilent en la matière.
En effet, plusieurs critères sont analysés par l’Administration fiscale.
Les raisons entourant la souscription du contrat d’assurance-vie sont multiples : l’âge du souscripteur, le montant des primes, la sécurité, le rendement…
Si un propriétaire d’un patrimoine immobilier locatif important souhaite se prémunir de la complexité de la gestion locative, de la défaillance des locataires et s’assurer un revenu sécurisé, régulier, la vente de ce patrimoine et le réinvestissement sur un contrat d’assurance-vie est compréhensible.
Cependant, si ce propriétaire se savait en phase terminale, condamné par une maladie incurable, qu’il a souscrit ledit contrat quelques jours seulement avant son décès, que les primes versées représentaient l’intégralité ou la majeure partie de ses avoirs, l’absence d’aléa au contrat souscrit est constitutive de l’abus de droit.
En revanche, il en sera autrement en cas de décès inopiné tels qu’un accident de la route, un AVC ou un accident cardiaque imprévisible.
L’existence du but exclusivement fiscal résulte du fait que le souscripteur n’avait pas la possibilité de tirer profit du contrat lui-même ou de retirer les fruits de son investissement et que les circonstances rendent la faculté de rachat illusoire.
Il convient donc d’analyser chaque situation car les conséquences fiscales seront alors extrêmement lourdes avec la réintégration à l’actif successoral des primes versées et l’application d’une majoration de 80% des droits.